Ecrire pour se décharger... cela paraît tellement stupide que je ris presque de cette idée totalement débile. Et pourtant je le fais. Pourquoi pas après tout, ça ou autre chose... De toute manière je n’ai même plus mon piano pour me défouler, alors il faut bien trouver autre chose. J’espère juste que l’on ne tombera pas sur ce morceau de papier... Au pire je le brûlerai, au moins je serai tranquille. En même temps cela ne me ressemble pas de ne pas leur balancer en pleine face ce que je pense, mais après tout ce que je viens déjà de leur dire, je n’ai même plus l’envie de les croiser un seul instant. Ils savent au fond tout comme moi que je repartirais dans une colère noire. Pourquoi ? Je n’en sais rien en fait, même s’ils me le demandent en longueur de journée. D’aussi loin que je me souvienne de toute façon je ne me suis jamais entendu avec mes parents. On ne fait pas parti du même monde, ce doit être ça. Mais à quoi est-ce que cela sert d’être et de vivre dans le paraître ? Etre entouré de richesse et de monde ne m’a jamais intéressé, je m’en contre-fiche. Tout ce que je demande c’est que l’on me foute la paix, rien de plus ! Pourquoi est-ce que c’est si difficile à comprendre ? Je veux me barrer d’ici, quand est-ce qu’ils vont le réaliser ?! Je veux partir, fuir loin de tout le monde, et ne plus jamais revenir. J’étouffe, il n’y a pas d’autres mots. Voir cette ville, ces visages, ce manoir dans lequel je vis, ces éternels comportements de bourges criant de fausseté me donnent envie de vomir... Si ça ne tenait qu’à moi je cramerais tout ça, je ferai en sorte que tout disparaisse une bonne fois pour toute ! Mais ça, bien entendu, je ne peux pas le faire, alors le seul moyen que j’ai c’est de fuguer. Sauf qu’on finit toujours par me retrouver. La « chance » d’être dans l’une des plus riches familles du Japon... Même au lycée on ne veut pas me virer. Apparemment mon « mauvais comportement » leur importe peu du moment que mon père leur envoie des chèques et que j’ai de bonnes notes... J’en ai marre de cette vie, j’aimerai que tout s’arrête. D’ailleurs tout va se terminer. J’écris peut-être sous le coup de la colère, mais je m’en fiche complètement. Je ne changerai pas d’avis. J’en peux plus de tout ça, et s’ils aiment contrôler à ce point ma vie quoi que je fasse, au moins ils ne contrôleront pas ma mort. Je vais le faire, c’est clair. Finalement, peut-être tomberez-vous sur cette lettre. En fait je ne vais pas la brûler, non. Quand vous la lirez, vous comprendrez combien je vous déteste. Cette « connerie » que je vais faire, c’est à cause de vous tous. Je m’
- Monsieur Kurosaki ? Demanda une voix timide, après avoir doucement frappé à la porte, m’interrompant dans l'écriture de ma sinistre litanie.
Je lâchais aussitôt un juron, jetant le stylo que je tenais dans les mains avant de m’affaler un peu plus sur ma chaise de bureau dans laquelle j’étais assis. Décidément, on ne pourra jamais me laisser une seule seconde tranquille !
- Foutez-moi la paix ! Criais-je, tandis que j’entendis alors les pas de la domestique s’éloigner.
Il ne manquait plus qu’elle s’y mette celle-là aussi... Je relevais un peu le menton, tournant la tête vers la grande fenêtre qui se trouvait juste en face de moi pour voir à travers, scrutant une nouvelle fois la cour du manoir. Apparemment, la voiture de police était encore là. Encore une fois on m’avait retrouvé... Je ne pourrais pas attendre pas ma majorité à 20 ans, je n’avais plus la moindre once de patience.
Dans un profond soupir d’agacement et de colère, je pris la lettre qui se tenait devant moi et la froissais vigoureusement avant de la balancer à la corbeille. Toute cette histoire m’usait, je n’en pouvais plus. Cela ne me ressemblait pas d’être aussi mauvais et colérique, et intérieurement je m’en voulais profondément de réagir de la sorte. Au fond, je ne pouvais pas m’empêcher de profondément culpabiliser lorsque je hurlais envers tout le monde, leur parlant sur un ton des plus venimeux. J’avais horreur d’être comme ça, mais pourtant je n’arrivais plus à faire autrement. C’était plus fort que moi... Je ne sais pas à quoi cela tiens, au fond je ne sais même pas ce que je leur reproche. Peut-être est-ce parce que je ne supporte pas cette vie trop dorée et trop parfaite, parce que je ne m’y sens absolument pas à ma place. Mais où est-elle ma place ? Une question à laquelle je n’aurais sans aucun doute jamais la réponse. J’allais mal, et ce depuis des années, c’était la seule chose que je voyais. Je n’en pouvais plus de vivre dans ce monde puant l’argent, où chacun est obligé de se cacher derrière un masque pour renvoyer aux autres une image des plus parfaites. Cela ne me ressemblait pas, à leur plus grand regret. Ils ne le montrent pas mais un fils gothique et suicidaire gâche pourtant leur belle image de célèbres personnalités du monde des affaires. Sauf que je ne suis pas comme ça, et pourtant, si je me montre tel que je suis par ma manière de me vêtir et par mes nombreuses conneries diverses et variées, je mens autant qu’eux. Et je n’ai pas le choix, je ne peux pas faire autrement... Personne ne doit savoir quel secret ma famille et moi devons cacher, car si cela venait à se savoir... Au fond je devrais leur être reconnaissant d’avoir toujours tût cette histoire, mais elle est un fardeau bien trop lourd à porter. Et puis au fond je me dis que ce n’est pas moi qu’ils veulent protéger, mais leur maudite réputation. Si jamais cela venait à se savoir que c’est moi qui l’ai tué, quand bien même c’était un accident, nous ne serions plus jamais considérés de la même manière. Alors ils ont maquillé sa mort, et nul n’a jamais su que c’était à cause de moi que ma sœur était morte... Jamais...
Le regard perdu devant moi, je ne cessais de faire défiler ces images dans ma tête. Cette scène atroce où elle gisait dans une mare de sang à cause de moi... Je n’avais même pas fait attention au fait que la porte de ma chambre venait doucement de s’ouvrir. Ce fut que lorsqu’une main se posa sur mes épaules que je revins à la réalité. Sans détourner la tête, je sentis la présence de ma mère à mes côtés, et entendit le lit légèrement s’affaisser alors que mon père s’était assis sur mon lit, juste à côté de mon bureau auquel j’étais. Un crissement de pneu dans l’allée et je sus que les flics venait de partir. Le visage impassible, ne laissant pas transparaître la moindre émotion alors que toute colère venait de me quitter pour laisser place à une profonde tristesse, retentit alors faiblement mais assurément la voix de mon père :
- Light, il faut que l’on parle.
A ces mots, je sentis la main de ma mère toujours posée sur mon épaule se mettre doucement à trembler d’émotion. Qu’allaient-ils me dire... Je ne répondis rien, gardant le silence en attendant la suite, fixant toujours le mur devant moi. C’est alors qu’il se redressa légèrement pour glisser un dépliant devant mes yeux, avant de reprendre.
- Nous avons longuement réfléchis ta mère et moi, et nous pensons que c’est la meilleure solution. Tu ne veux pas rester ici, et nous ne pouvons plus te gérer. Tu es allé trop loin cette fois, et nous pensons qu’il est temps de mettre un terme à tout cela.
Je baissais alors le regard vers le dépliant, toujours sans le moindre mot, et vis sur la couverte la photographie d’une magnifique académie visiblement très bourgeoise. Encore...
Au-dessus de l’image siégeait fièrement l’inscription « Pensionnat N. Hikishima », tandis qu’une phrase en-dessous précisait également qu’il s’agissait d’une académie ayant pour seuls mots d’ordre « la réussite » et le « prestige ».
- Aiko viendra préparer tes valises. Tu pars ce soir...